Question : Quelle est la base théorique de la vision de la République islamique et, par conséquent, de celle des organisations de sécurité du pays – qui convergent toutes vers le Secrétariat du Conseil suprême de sécurité nationale – concernant la « sécurité nationale » ?

A.A. Ahmadian : De notre point de vue, le peuple est le pilier de la sécurité nationale. La Révolution islamique a triomphé avec le peuple, a été créée par le peuple et reste avec le peuple. Toutes les théories entourant la question de la « sécurité nationale » sont subordonnées au pilier du peuple. Et quand je dis « peuple », je veux dire tout le peuple, car tout le peuple a participé à la Révolution. L’idée selon laquelle un groupe spécifique du pays a mené la Révolution est fausse. Certes, les contributions ont varié dans différentes tâches – dans certains domaines, un groupe a contribué davantage, tandis que dans d’autres, un autre groupe a eu une plus grande part – mais la Révolution a été menée par l’ensemble de la nation iranienne.

Cette perspective est enracinée à la fois dans les fondements théoriques et dans les positions pratiques du Guide suprême de la Révolution islamique. Il y a quelques années à peine, il a déclaré que la République islamique n’avait aucun sens sans le peuple et n’était rien sans lui. Cette Révolution, dès le début, a été fondée sur le principe d’avancer avec le peuple, de voir sa force en la présence du peuple et de reconnaître le pouvoir du peuple comme le sien. Selon les mots du Guide suprême de la Révolution, la « démocratie religieuse » signifie que, sur la base de l’islam, le « peuple » est le chef de la société et de ses propres affaires, et la Révolution a élevé cette voix dans le monde entier. Par conséquent, partout où la Révolution islamique est passée, sa caractéristique est que le peuple s’est soulevé, plutôt qu’un certain individu.

En ce qui concerne la Syrie, si l’on peut en débattre, il s’agit de savoir que nous n’avons pas porté le gouvernement syrien au pouvoir. Le gouvernement de la famille Assad existait avant nous et était solidement établi. En raison de notre caractéristique commune importante et louable d’opposition intransigeante au régime sioniste et de résistance contre l’Amérique et Israël, nous avons eu des interactions et un soutien mutuel.

Le deuxième point important auquel nous adhérons est la théorie de « l’idéalisme réaliste » du Guide suprême de la Révolution islamique. Il a proposé cette théorie en réponse à la dichotomie courante entre « idéalisme » et « réalisme », soulignant que l’idéalisme sans réalisme est une illusion, et le réalisme sans idéaux n’est qu’une routine quotidienne.

Question : Au cours de la dernière décennie, l’expansion des activités des groupes terroristes dans la région a incité la République islamique d’Iran à étendre sa présence militaire et consultative au-delà de ses frontières officielles afin de mener des opérations antiterroristes. La présence militaire et consultative de l’Iran est, bien entendu, soumise à certains principes et réglementations. Quels sont ces principes et réglementations ?

A. A. Ahmadian : La présence de la République islamique d’Iran, où qu’elle se trouve, même dans les endroits où elle a été fondée sur des idéaux, a toujours été régie par certains principes. Il y a eu des exceptions, des erreurs, mais les principes que je vais mentionner ont toujours été à la base de tout cela :

Le premier principe est la défense absolue du pays, du peuple et des intérêts nationaux contre les menaces extérieures. Il n’y a jamais eu de doute à ce sujet. Que l’ennemi soit les États-Unis, Israël, un petit pays ou un voisin, ce principe a toujours servi de base à l’action.

Un autre principe important est que nous n’avons jamais été les initiateurs d’une agression contre qui que ce soit. Le Guide suprême de la Révolution islamique a toujours adhéré à ce principe. À maintes reprises, d’autres ont amené une situation au bord de la décision, mais lorsque la situation a atteint le niveau de la direction, il est intervenu progressivement pour enseigner ce principe aux autres responsables.

Le troisième principe est la non-ingérence dans les affaires des autres pays. Malgré ses slogans idéalistes et sa perspective parfois mondiale, la Révolution islamique s’est abstenue d’intervenir dans d’autres pays en raison de ces idéaux ou même pour des intérêts nationaux - ce qui reflète une approche réaliste - sauf dans trois conditions spécifiques :

Tout d’abord, le gouvernement officiel d’un pays doit formuler une demande officielle. En Syrie et en Irak, nous avons reçu une demande officielle des gouvernements de l’époque de ces deux pays pour notre présence. Par exemple, si vous vous souvenez, lors de l’incident impliquant l’assassinat et le martyre du général Soleimani, le Premier ministre irakien a déclaré qu’il avait invité le martyr Soleimani en Irak. Lors de notre présence dans la lutte contre Daech, M. Maliki (le Premier ministre irakien de l’époque) a sollicité notre aide pour combattre Daech. Par conséquent, une demande officielle était certainement l’une des conditions préalables.

Deuxièmement, il est essentiel d’éviter la confrontation avec la population. Chaque fois que quelqu’un nous invite à aller quelque part aujourd’hui, par exemple pour nous engager là-bas contre les gens et en leur faveur, nous ne le ferons certainement pas, et c’est l’un des principes auxquels nous prêtons attention.

Troisièmement, la présence d’un intérêt ou d’une aspiration claire est certaine. Il faut soit avoir un intérêt national bien défini, soit un idéal fort, comme notre engagement à « défendre les opprimés », qui est l’un de nos idéaux et de nos principes. Si une nation est opprimée et que les deux autres conditions que j’ai mentionnées sont réunies, il n’y a aucune raison pour que nous n’intervenions pas, car cela devient une obligation religieuse et humanitaire qui nous incombe.

Bien sûr, il y a des moments où défendre les opprimés n’est pas possible, auquel cas nous ne pouvons rien faire et ne pouvons qu’exprimer notre désapprobation par nos paroles. Mais il y a des moments où les conditions sont réunies, où le peuple est opprimé et où son gouvernement cherche de l’aide. Dans ce cas, il n’y a aucune raison pour que nous ne l’aidions pas, tout en adhérant au principe d’assistance et non de substitution. Cela signifie que le peuple lui-même doit s’engager dans la bataille et être présent sur le terrain pour que nous puissions l’aider.

Question : Les relations militaires et sécuritaires entre l’Iran et la Syrie ne se limitent pas à la dernière décennie. Sur quoi reposent ces relations et quelle est la raison de la présence de l’Iran en Syrie ? En outre, quels facteurs ont contribué à la récente réduction de la présence militaire iranienne dans la région ?

A. A. Ahmadian : Depuis que le gouvernement syrien de Hafez el-Assad a véritablement soutenu la Révolution islamique et que, malgré le fait que le parti Baas était au pouvoir en Irak, il nous a toujours apporté un soutien décisif pendant la guerre, nous avons multiplié nos interactions officielles et sur le terrain. L'une des raisons de la proximité de la Syrie avec l'Iran est que l'Égypte et la Jordanie se sont réconciliées avec le régime sioniste, alors que la Syrie ne s'est pas soumise à cet acte et s'est donc sentie isolée et menacée.

D'un autre côté, le système de gouvernance en Syrie était semblable aux autres systèmes arabes de la région. La caractéristique positive et distinctive de la famille Assad était qu'elle n'a pas cédé à toutes les pressions internationales et régionales, ainsi qu'à celles de ses amis, connaissances et ennemis, concernant la question de la résistance contre Israël et de la défense des droits du peuple palestinien. S'ils avaient fait un compromis, même minime, ils n'auraient pas eu à faire face à aucun de ces événements, et donc tout ce qui s'est passé était le prix de cette résistance.

Cependant, malgré la position antisioniste du gouvernement syrien, des comportements indésirables ont été observés dans une partie du système en place au sein du gouvernement syrien envers son peuple, ce qui a créé un fossé entre le gouvernement et une partie de la population syrienne. Un certain nombre de personnes voulaient vraiment le gouvernement, mais il y en avait aussi ceux qui ne le voulaient pas. Ils avaient des opinions et des désaccords qui n’ont pas d'ailleurs commencé avec la présence de la République islamique d’Iran.

D’un côté, il y a une rivalité de longue date entre le gouvernement de Hafez el-Assad et divers courants idéologiques dans le monde islamique, comme les Frères musulmans, ce qui a conduit à des différends permanents entre eux. Depuis sa création, et depuis l’époque de Hafez el-Assad, la République islamique d’Iran a constamment recommandé et œuvré pour guider cette région vers la convergence sociale et populaire. La raison en est la conviction que le peuple d’un pays est décisif, et cela a toujours été au cœur de l’approche de la République islamique.

Plus tard, un troisième phénomène est apparu dans cette région, qui a été la montée de Daech ; la sédition de Daech. Il faut distinguer complètement le comportement de la République islamique d’Iran pendant la période de l'émergence de Daech de celui de la période précédente. Oui, nous sommes entrés résolument en guerre contre Daech, tout comme nous les avons combattus en Syrie et en Irak. Aujourd’hui, si Daech réapparaît autour de nous avec les mêmes caractéristiques et traits qu’avant, et représente une menace pour nous à l’avenir, nous le réprimerons naturellement là-bas ; bien sûr, en respectant les mêmes conditions que j’ai mentionnées plus haut. Mais quelles étaient les caractéristiques de Daech qui nous ont conduit à cette conclusion ?

Premièrement, Daech était une création des services de renseignement. Nous étions informés et savions comment ils étaient libérés et de quelles prisons, qui travaillait avec eux, où ils étaient emmenés, comment ils étaient préparés et comment ils étaient déguisés en habits respectables. Au début, Daech a essayé de présenter une image légitime de lui-même et a voulu être une contrefaçon de toute la Révolution islamique. Par conséquent, Daech n’avait pas d’identité propre.

Deuxièmement, Daech manquait d’une base territoriale. Le point très important ici est que Daech n’appartenait à aucun territoire. Il n’y avait aucun endroit où nous pouvions dire : « C’est leur pays, leur géographie, ce sont les gens de cette terre, et nous les reconnaissons officiellement ici. » Non, ils étaient complètement sans territoire. Cela signifie que partout où nous les combattions, ce n’était pas un endroit qui leur appartenait.

Troisièmement, ils considéraient tout comme leur propre territoire ; ils considéraient les terres des autres comme leur propriété, et ils pensaient que le reste des pays islamiques et des pays de la région leur appartenaient. Ils étaient donc les adversaires de tous les pays de la région, y compris l’Iran.

Quatrièmement, ils avaient une mentalité takfiriste envers toutes les sectes islamiques. La fondation de Daech était basée sur le takfir, non seulement contre les chiites, mais aussi contre tous les autres en les qualifiants de mécréants, sauf eux-mêmes.

Cinquièmement, ils se sont livrés au terrorisme de masse. À tous égards, Daech était une organisation terroriste. Son arme principale était essentiellement le terrorisme, et c’est toujours le cas aujourd’hui. Leur terrorisme n’était pas dirigé contre des personnalités politiques ou militaires, mais contre la population en général. Tout le monde se souvient de l’explosion de Kerman. Daech a publié un communiqué affirmant que les combattants en quête de martyrs avaient mené une opération réussie ! Ils l’ont eux-mêmes reconnu. Ils poursuivent ces actions quotidiennement. Nos forces de sécurité arrêtent constamment les différentes équipes qu’elles envoient dans le pays, et une guerre continue et cachée se déroule. Par exemple, ils arrêtent parfois vingt membres de leurs groupes dans le pays. Une fois la présence de Daech établie, il n’y avait plus de place pour l’hésitation. Cependant, certains groupes d’opposition syriens ont contribué d’une manière ou d’une autre à l’émergence d’un tel mouvement ou l’ont rejoint plus tard, le renforçant ainsi, ce qui nous a amenés à nous impliquer également. Dans ce cas, bien sûr, dès le début, nous avons clairement fait la distinction entre Daech et les autres groupes d’opposition. Par la grâce de Dieu, Daech a été éliminé par des opérations successives et organisées, tant en Irak qu’en Syrie. Cependant, en ce qui concerne les autres groupes d’opposition – qui étaient principalement les mêmes groupes d’opposition impliqués dans les événements d’Alep, de Damas, de la Ghouta orientale et occidentale, de Deraa et de Soueida dans le sud – la République islamique d’Iran a tenté de servir de médiateur entre eux et le gouvernement.

Bien sûr, si nous étions attaqués quelque part, nous nous défendrions. Dans les zones où nous étions présents pour combattre Daech – par exemple, nous avions besoin de l’aéroport d’Alep ou des routes comme l’autoroute Alep-Damas – nous avions des lignes de défense. Si quelqu’un nous attaquait, nous devions nous défendre, voire parfois le repousser un peu. Mais notre objectif n’a jamais été de les éradiquer comme nous l’avons fait contre Daech. Même quand ils étaient assiégés et qu’il a été décidé qu’ils seraient évacués, nous avons assuré leur sécurité pour qu’ils puissent être transférés de ces différents points vers Idlib. A Alep, certains de nos amis ont risqué leur vie pour transférer les familles de ces mêmes opposants, qui se trouvaient dans une partie d’Alep, vers cette région d’Idlib. Plus tard, dans tous les accords politiques, nous avons soutenu l’idée qu’ils devaient avoir un endroit à eux, qu’ils puissent s’y installer, et que ce serait une zone de désescalade où personne ne les affronterait.

Avec la fin de Daech, la région a été remise à l’armée syrienne, et notre présence totale n’était plus d’actualité. Bien sûr, le gouvernement de Bachar al-Assad subissait également une pression intense de la part des Arabes, d’Israël et des États-Unis en raison de la présence des Iraniens. Ils clamaient que l’Iran avait conquis la Syrie et ainsi de suite ! Eh bien, ce qui s’est passé, c’est que presque toutes nos forces se sont retirées de là, ne laissant que la partie qui était nécessaire à la Résistance ou à l’aide à l’armée ou au gouvernement syrien.

Question : Certaines analyses indiquent que les différents groupes présents dans le nord-ouest de la Syrie étaient en mouvement avant la récente offensive. L’Iran n’a-t-il pas fourni à la Syrie des renseignements sur ces mouvements ?

A. A. Ahmadian : Chacun de ces groupes a une origine et une perspective différentes sur la Turquie, la Syrie, l’Iran, les chiites et Israël. Par conséquent, ils ont des positions différentes. De ce point de vue, ils sont un groupe désorganisé, mais ils étaient en train de parvenir à un accord pour mener une telle action. Ces mouvements ont été signalés à plusieurs reprises au gouvernement syrien, et eux-mêmes ne manquaient pas de capacités de renseignement – ​​ils en étaient également conscients. Cependant, deux problèmes étaient en jeu ici. Premièrement, les responsables et les militaires syriens ne croyaient pas que ces groupes pouvaient mener une action significative. Deuxièmement, ils comptaient sur leur propre appareil militaire et de sécurité. Ils pensaient que même si ces groupes faisaient une action et que la situation devenait quelque peu instable, ils parviendraient finalement à la contenir. Par conséquent, le gouvernement syrien n’a jamais sérieusement perçu la menace de ces groupes. Bien sûr, il ne s’attendait pas non plus à un tel potentiel d’effondrement au sein de l’armée syrienne ! Finalement, ils ont commencé leurs opérations et, encore une fois, l’armée syrienne a été conseillée à plusieurs reprises sur les endroits où elle pouvait et devait les bloquer – car nous pensions que même si elle avait l’intention de négocier avec ces groupes, elle devait consolider sa position. Cependant, il n’y avait aucune volonté de combattre ou de résister au sein de l’armée syrienne. En conséquence, les zones syriennes sont tombées une par une, pour finalement atteindre Damas. Pendant ce temps, nous avons eu des discussions avec Bachar al-Assad et des responsables militaires syriens, leur offrant des conseils et essayant à nouveau d’activer le processus politique. Le voyage de M. Araghchi en Turquie et sa visite à Doha ont fait partie de cet effort, qui a permis quelques succès. La déclaration du groupe D-8, à mon avis, était bonne, d’autant plus que cinq pays arabes de la région l’ont rejoint, ont exprimé leurs inquiétudes et ont appelé à une résolution politique. Cependant, le rythme rapide de l’effondrement n’a pas laissé la possibilité à ces efforts de porter leurs fruits.

Question : Il existe une ambiguïté majeure au sein de l’opinion publique en Iran concernant le manque d’implication directe du pays dans la lutte contre cette offensive. Notre pays avait-il décidé de ne pas intervenir directement ou y avait-il une autre raison ?

A. A. Ahmadian : L’Iran n’a jamais été censé combattre aux côtés de l’armée syrienne, surtout contre une force qui ne représente pas une menace décisive pour la République islamique. S’il y avait eu une préparation suffisante, une possibilité de transférer des forces et du matériel, et si l’effondrement n’avait pas eu lieu aussi rapidement – ​​à condition que le peuple et l’armée syriens aient tenu bon – alors nous aurions certainement été à leurs côtés également. De plus, le gouvernement syrien ne nous a pas fait une telle demande avant les tout derniers jours.

Question : Certains médias hostiles tentent d’instiller l’idée que la présence et les dépenses passées de l’Iran en Syrie étaient vaines. Que pensez-vous de ces propos ?

A. A. Ahmadian : Nous ne regrettons pas nos dépenses. Je ne dis pas cela pour la rhétorique ; nous ne regrettons vraiment pas car notre présence et nos dépenses étaient pour notre propre sécurité, et les résultats escomptés ont également été obtenus. Si Daesh n’avait pas été éliminé en Syrie et en Irak, nous aurions dû les combattre aujourd’hui sur notre propre sol, à un coût dix fois plus élevé. Je ne pense pas que quelqu'un doute que si un gouvernement de Daesh avait été établi en Irak et en Syrie, nous aurions été obligés de les affronter à nos frontières, à l’intérieur du pays ou le long des frontières de l’Irak. Ils ont ouvertement déclaré que leur objectif ultime était l’Iran ! Eh bien, l’objectif de vaincre Daesh a été atteint, et c’était un exploit important qui a complètement déjoué le plan américain et réduit à néant des années d’investissement de leur part. Peut-être que tout le monde ne connaît pas les détails, mais ils ont vraiment construit une armée. De leur propre aveu, ils ont construit un gouvernement et une société pour contrer la Révolution islamique, pensant avoir terminé le travail. Grâce aux actions de la République islamique d’Iran, ce plan a été démantelé, et cet exploit à lui seul suffit à justifier le coût de notre présence.

Il va sans dire que nous avons réussi à renforcer la Palestine et le Hezbollah, en les équipant si bien qu’ils ne dépendent plus de nous. Aujourd’hui, le Hezbollah est un groupe complètement indépendant et autonome. En ce qui concerne Gaza, par exemple, vous voyez que dans les tunnels, ils fabriquent des roquettes et des missiles pour eux-mêmes. Le Hezbollah, qui opère sur un territoire plus vaste, doit être devenu encore plus puissant et mieux équipé. Le Hezbollah a gagné en force politique et culturelle. Malgré toutes les campagnes de diffamation, vous pouvez voir le soutien massif que le Hezbollah reçoit aujourd’hui au Liban ! Même les gens qui ont souffert de graves difficultés dans leur vie reviennent avec le drapeau du Hezbollah. Telles sont les bénédictions et les profondeurs stratégiques et culturelles de la Révolution islamique. Le Hezbollah jouit d’un tel statut au Liban. Personne ne peut éliminer le Hamas, le Jihad islamique ou le Hezbollah, ni effacer Ansarullah. Ces groupes sont profondément enracinés dans la population, des gens armés, mûrs et dotés des connaissances et de la technologie nécessaires pour produire l’équipement nécessaire à leur défense.

Question : Dans les circonstances actuelles, soutenir la Résistance semble devenir plus difficile, n’est-ce pas ?

A. A. Ahmadian : Oui, cela devient plus difficile. Bien sûr, à certains moments, notre travail est devenu plus difficile, et à d’autres, il est devenu plus facile ; c’est naturel et cela a été le cas depuis le début. Mais le premier point est qu’aujourd’hui, le Hezbollah, le Hamas et le Jihad islamique ne dépendent pas beaucoup de notre soutien physique direct. Regardez ! Avons-nous eu des contacts directs avec le Hamas à Gaza pendant cette période ? Nous n’en avons jamais eu. Les blocus imposés par Israël et ses alliés ont toujours surveillé la situation. Avons-nous maintenant une connexion terrestre directe avec le Yémen ? Les routes maritimes sont également sous blocus. Pourtant, le peuple yéménite surprend le monde chaque jour et produit des missiles d’une portée de 1 000 kilomètres ! C’est vraiment extraordinaire.

Il nous a fallu beaucoup de temps pour développer la capacité de produire des missiles, mais les Yéménites y sont parvenus en peu de temps. C’est une autre bénédiction et un honneur de la Révolution islamique. Partout où elle intervient, elle élève le peuple de ce pays, le rendant mature et digne sur la base de croyances divines, contrairement à Pharaon, qui rendait son peuple dépendant et faible : « Il rabaissa donc son peuple, et ils lui obéirent » (Coran 43:54). C’est la même approche que l’Amérique adopte aujourd’hui avec ses satellites. En revanche, la Révolution islamique, comme Moïse et d’autres prophètes divins, donne du pouvoir aux autres. Combien d’années la Syrie a-t-elle été alignée sur l’ex-Union soviétique ? C’était une longue période, mais ils n’ont même pas reçu la technologie pour produire une seule pièce de char de manière indépendante. Cependant, grâce à ses liens avec la Révolution islamique, la Syrie a développé des capacités de production de missiles. De toute façon, la résistance ne dépend pas de nous pour sa survie. De plus, les liens de l’Iran avec la Résistance et le Hezbollah ne seront jamais coupés.

Question : L’une des ambiguïtés importantes concerne la position de l’Iran dans la région. Certaines de ces ambiguïtés, qui confinent parfois à des accusations contre la République islamique, suggèrent que l’Iran est pris dans un cycle d’affaiblissement. Quelle est votre analyse de la position actuelle de l’Iran dans la région ?

A. A. Ahmadian : Il s’agit d’une opération psychologique de l’ennemi. Le travail de Satan consiste à instiller la peur : « Satan vous menace de pauvreté et vous pousse vers l’immoralité » (Coran 2:268). La stratégie d’Israël consiste à instiller des sentiments de faiblesse et d’humiliation. Malheureusement, je constate que certaines personnes à l’intérieur du pays sont tombées dans ce piège de l’opération psychologique de l’ennemi. C’est-à-dire qu’elles continuent involontairement à faire ce que veut Israël en perpétuant ce sentiment de faiblesse, aidant ainsi la stratégie de l’ennemi.

Certains posent des questions, parfois avec malveillance et d’autres fois avec des objectifs précis, comme : « Qu’est-il arrivé à l’opération Promesse Véridique III ? Allez-vous frapper maintenant ou demain ? » Eh bien, la question est claire : elle suit la logique militaire. Nous frappons chaque fois que cela est nécessaire et approprié, chaque fois que cela cause plus de souffrance à l’ennemi et chaque fois que cela sert nos intérêts nationaux. Les opérations ne peuvent pas et ne doivent pas être menées sur la base des sentiments. Entre la première et la deuxième phase de l’opération Promesse Véridique, nous avons analysé les faiblesses de notre frappe initiale et évalué les capacités de l’ennemi. En conséquence, la deuxième phase a été meilleure. Ces actions sont régies par la raison, la planification, la logique et le réalisme que j’ai mentionnés plus tôt.

À mon avis, nous devons d’abord passer aujourd’hui d’une position défensive dans les opérations psychologiques et médiatiques à une position offensive. La réalité nous montre que si un acte d’agression est commis contre nous, même beaucoup de ceux qui sont, pour ainsi dire, opposés au gouvernement ou qui sont en désaccord avec lui se lèveront pour défendre leur pays.

Deuxièmement, d’un point de vue stratégique, qui a été vraiment vaincu ? Regardons la situation du régime sioniste dans les 400 à 500 jours qui ont suivi l’opération Déluge d'Al-Aqsa. Israël, qui était autrefois un État fabriqué mais passé pour officiel, est devenu aujourd’hui un régime d’occupation, de génocide et d’apartheid, dont le Premier ministre est poursuivi en justice. En revanche, le peuple palestinien a été reconnu comme l’habitant légitime de cette terre et comme un mouvement de libération luttant contre l’occupation. Les peuples du monde et même de nombreuses institutions officielles ont été contraints de reconnaître et de défendre le fait que la Palestine appartient aux Palestiniens et qu’Israël est la force d’occupation depuis soixante-dix ans. La vérité est qu’aujourd’hui Israël est épuisé. Malgré toutes ses actions, il manque toujours de sécurité et de légitimité. Ses divisions internes se sont considérablement intensifiées et son économie est dans un état désastreux. Certains Occidentaux disent que les enfants de Gaza et du Liban grandiront pour devenir soit Yahya Sinwar, soit Sayed Hassan Nasrallah. Le mouvement général est donc celui de la victoire du Front de la Résistance et de la Révolution islamique, un mouvement de renforcement pour la Révolution islamique et de faiblesse et d’humiliation pour Israël.

Question : Compte tenu de vos interprétations de la force et du renforcement du Front de la Résistance, il semble que la République islamique s’appuie principalement sur le renforcement du peuple, du monde islamique et de la Résistance pour combattre le régime sioniste, plutôt que de se concentrer uniquement sur la confrontation militaire.

A. A. Ahmadian : Oui, c’est exact. Le peuple palestinien doit être capable de se défendre et de répondre à l’agression contre lui-même. Israël, de par sa nature même, possède le talent nécessaire et suffisant pour s’effondrer. Il lui manque le talent pour survivre à long terme, car c’est une entité factice. Les événements de l’année dernière ont illustré de manière frappante cette trajectoire. Israël s’est effondré dans l’esprit des gens du monde entier, et les perceptions mondiales ont changé. Aujourd’hui, il n’y a personne qui ne rejette Israël. Il n’y a personne au monde qui ne reconnaisse l’illégitimité d’Israël et la légitimité de la cause palestinienne. Israël a perdu sa légitimité et son acceptation fabriquées, révélant la réalité de son statut d'occupant, de génocidaire et d'apartheid. C’est la tendance dominante.

(Les opinions exprimées dans cette interview sont celles de la personne interviewée et ne reflètent pas nécessairement celles de Khamenei.ir.)