Au nom d'Allah, le Tout- Miséricordieux, le Très-Miséricordieux

 

Intervieweur : À votre avis, quel est le rôle des États-Unis et des sionistes dans la formation de « l’accord du siècle » et que poursuivent-ils avec cette intrigue ?

 

M. Zarif : Malheureusement, au cours des dernières années - en particulier ces quelques années récentes - non seulement le monde arabe a adopté une vision passive envers le régime sioniste et envers les États -Unis, mais ils se sont aussi transformés en alliés des sionistes contre le pays islamique de la Palestine. Cette démarche les a poussés dans une position de faiblesse. C'est pourquoi les Américains sont parvenus à la conclusion qu'ils peuvent dévoiler leur plan. Cependant, jusqu'à il y a quelques années, les Américains n'étaient pas dans la même situation ; mais ils pensent même aujourd’hui à transformer la question de la Palestine en une transaction immobilière et à sacrifier tous les souhaits, les rêves et les droits essentiels du peuple de Palestine pour le bien de leurs propres projets de construction. Sur la base de ce que pensent et disent Trump et Kushner, ils ne sont pas du tout préoccupés par les droits de quiconque et ils considèrent ce plan comme un projet [immobilier]. Ils sont parvenus à la conclusion que le monde arabe est tellement humilié qu'ils peuvent présenter un plan aussi méprisable au nom des droits du peuple palestinien.

En fait, cette intrigue transformerait la Palestine en quelque chose comme les Bantoustans de l'ère de l'apartheid en Afrique du Sud. En d’autres termes, il y aurait des régions désignées qui se formeront aux centre de la Palestine occupée afin de contrôler ses habitants. Dans cette intrigue, tout est sous le contrôle du régime sioniste car les clauses spécifiées dans « l’accord du siècle » sont au-delà de celles évoquées dans les accords d'Oslo et de Madrid. Dans sa forme actuelle, le plan métamorphoserait la Palestine en petits segments situés parmi les territoires encerclés par les territoires sionistes. Il accorderait même aux sionistes la souveraineté sur toutes les terres contestées depuis 1967. Le souhait de Trump pour annexer le Golan syrien et Bayt-ul-Moqaddas, la capitale des musulmans, au régime sioniste - ce sont les régions qui n’appartiennent jamais aux sionistes - ne provient que de la passivité et la dégradation des Arabes face aux Américains et aux sionistes. Le monde arabe cherche toujours à acheter de la sécurité auprès des États-Unis et du régime sioniste. Au lieu de compter sur eux-mêmes, leur peuple et leurs voisins musulmans, ils continuent de persister dans leur désir d'acheter de la sécurité auprès des États-Unis. En ce qui concerne les Américains, bien sûr, ils accueillent cette situation en raison du fait que, par exemple, ils vendent des armes à l’Arabie saoudite à une valeur annuelle de 67 milliards de dollars ; mais tout en lui vendant des armes, ils achètent en échange la dignité de l’Arabie saoudite.

 

Interviewer : compte tenu de la réaction négative des chefs d'État arabes envers les conséquences de « l’accord du siècle », pourquoi certains d’entre eux ont-ils eu une telle réaction et pensent qu’il produirait des effets inverses ?

M. Zarif : La position adoptée par certains chefs de pays arabes - qui se sont transformés aujourd'hui en dirigeants du monde arabe en raison des problèmes auxquels sont confrontés les grands pays arabes - est différente de celle du peuple arabe, mais la chose importante qui est arrivé, c'est que les régimes arabes dépendants ont tenté ces dernières années de présenter la République islamique comme un danger mensonger pour leur peuple.

 

Néanmoins, le récent incident a montré que le danger auquel le monde arabe est confronté est en effet incarné par les maîtres actuels des pays arabes qui violent, à la fois, tous les rêves et les droits des Palestiniens alors que ces dirigeants [arabes] n’osent même pas les affronter. Au lieu d'adopter une position en faveur de la Palestine, ils vont même jusqu'à remercier M. Trump. En fait, c'est un message au monde arabe que la question de la Palestine ne peut pas être résolue avec de telles politiques, mais qu'ils devraient retourner et reconnaître le danger du sionisme qui est une menace pour le monde de l'Islam et aussi le danger des individus qui poursuivent la politique humiliante de coopération et de collaboration avec le régime sioniste.

 

À mon avis, c'est une occasion pour le monde de l'islam de réaliser que la solution de la question de la Palestine tourne autour des deux pivots de la démocratie et de la résistance. Le but de la Résistance est clair et les Palestiniens résistent également, mais aujourd'hui, tous les Palestiniens devraient exprimer leur opposition unanime à « l’accord du siècle ». L'unité à l'intérieur de la Palestine sur la base de la résistance peut s'avérer être un phénomène très propice pour déjouer les politiques sionistes.

 

La démocratie est également un facteur très important. Ceux dont le cri de la démocratie a assourdi les oreilles du monde entier et qui considèrent le régime sioniste comme la seule démocratie de la région, devraient être prêts à accepter la vraie démocratie. Que signifie la vraie démocratie ? Cela signifie que tous ceux qui vivent en Palestine, qui sont les véritables propriétaires de la Palestine, mais qui ont été déplacés à travers le monde, devraient pouvoir déterminer et prendre des décisions pour leur propre avenir. Pourquoi les partisans de la démocratie sont-ils intimidés par cette proposition ?

 [Ou concernant] la proposition que le Guide suprême de la Révolution a avancée au cours des dernières années comme « la proposition de la République islamique de pour la question de la Palestine » - qui est naturellement une proposition logique, est-ce que lorsqu'un plan similaire a été mis en œuvre en Afrique du Sud et que l'apartheid a été éliminé à la suite de cela, il a conduit au massacre des blancs ? Pourquoi souhaitent-ils promouvoir à tort l'idée que ce plan entraînera le massacre des Juifs ? Le Guide suprême a réitéré à plusieurs reprises que nous n’avons rien contre les juifs et que les juifs qui vivent en Palestine ont le droit d'y résider, mais ils ne peuvent pas déterminer le sort des autres. Ce sont tous les Palestiniens qui doivent déterminer leur propre sort.

 

En Afrique du Sud, les Africains - y compris les noirs, les blancs et les gens de couleur, autrefois divisés en différents groupes, privés du droit humain à vivre ensemble -, ont décidé de mettre un terme à un tel système. Près de 30 ans se sont écoulés depuis [l'époque de] ce système, mais nous n'avons été témoins d'aucune guerre ni d’aucun massacre en Afrique du Sud. Quant à la Palestine, au lieu de céder à l'humiliation et aux pressions croissantes et infinies exercées par les États-Unis et le régime sioniste, il existe deux mesures qui doivent être menées simultanément, sans séparer l’une de l’autre. L'une est la résistance et l'autre est la démocratie et le vote du peuple. S'ils mettent ces deux mesures en pratique, la question de Palestine sera résolue. L’année dernière, nous avons enregistré auprès des Nations Unies la proposition du Guide suprême en tant que proposition officiellement reconnue, afin que le monde entier se familiarise avec elle, comme elle la connaît déjà dans une certaine mesure. Lorsque « l'accord du siècle » était sur le point d'être dévoilé, nous avons promu le plan proposé par le Guide suprême de la Révolution afin que le monde sache que la seule solution pour la Palestine n'est pas simplement de violer les droits des Palestiniens pour poursuivre une affaire pareille à un projet de construction immobilière, et que la seule solution est plutôt de faire valoir les droits des Palestiniens.

 

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Intervieweur : Comment le plan proposé par la République islamique peut-il se rapprocher des résultats concrets ?

 

M. Zarif : Notez que la décision finale appartient au peuple de Palestine. Ce sont eux qui devraient prendre cette décision. À notre avis, l'une des erreurs commises par certains au cours des 30 dernières années a été de penser qu'ils pourraient réinstaurer les droits des Palestiniens grâce à la coopération avec les occupants. Cependant, aujourd'hui, toutes les parties palestiniennes ont réalisé que ce n'était pas le cas. Par conséquent, ils devraient commencer à réfléchir à une alternative à l'accord d'Oslo et, par la suite, à « l’accord du siècle », qui est en effet la continuation des politiques de médiation des États-Unis sur la question de la Palestine occupée. Par conséquent, les Palestiniens devraient accepter que ce n’est pas simplement une autre médiation et que les États-Unis constituent eux-mêmes un côté du problème et du différend. Par conséquent, ils devraient travailler sur un plan qui peut leur fournir une solution.

 

Nous avons toujours souligné que ce sont les Palestiniens qui ont le droit de choisir et la République islamique acceptera le chemin pour lequel opte peuple de Palestine. En d'autres termes, nous acceptons que les Palestiniens prennent la décision finale et que leur décision finale soit respectée par tous.

 

Interviewer : Il y a quelques années, dans sa prédiction stratégique, le Guide suprême de la Révolution a annoncé que le régime sioniste ne vivra plus dans 25 ans. [C’est-à-dire qu'il sera éliminé]. Comment « l’accord du siècle » peut-il accélérer l'élimination du régime sioniste ?

 

Dr. Zarif : Le moment où les Palestiniens en viennent à croire qu’accepter la médiation des USA n'est pas la voie pour les amener à leur objectif, et quand ils se rendent compte que la seule voie pour y atteindre passe par l’utilisation de leur pouvoir de résistance et la rechercher de la démocratie [alors cela arrivera]. Le plus grand point faible du régime sioniste résident dans le fait que les Palestiniens insistent sur [le rétablissement de] leurs droits et ce chemin aboutira au résultat souhaité à condition qu’ils mettent de côté les solutions falsifiées et poursuivent celle basée sur la démocratie.

 

Interviewer : Après l’enregistrement auprès des Nations Unies de la proposition référendaire du Guide suprême en tant que proposition officiellement de la République islamique d’Iran, dites-nous quelle a été la réaction du régime sioniste à ce genre de propositions ?
 

Notez que la question la plus ancienne que les Nations Unies aient abordée est celle de la Palestine. Et dès le début, aucune bonne solution pour la question de la Palestine n'a été évoquée à l’ONU. Il est intéressant de savoir que même le régime de Pahlavi avait proposé une solution démocratique à la question de Palestine et n’a pas accepté la proposition de violer les droits du peuple palestinien en faveur des sionistes. À cette époque également, l'Iran était l'un des pays qui n'a pas accepté le plan de désintégration de la Palestine. Bien sûr, les pays arabes n'étaient pas non plus en faveur de la politique de désintégration et, par conséquent, cette erreur devrait être compensée par une solution démocratique.

Cependant, le régime sioniste promeut toujours l'idée qu'il y a des anti-juifs (antisémites) dans le monde, mais il n'y a pas d'anti-juifs. Ceux qui ont des antécédents anti-juifs vivent ailleurs dans le monde. Dans cette région, nous n'avons pas de précédents anti-juifs. Les peuples de cette région ont toujours accueilli - et accueillit encore - les Juifs d’une manière chaleureuse. Nous considérons de notre devoir de respecter le Prophète Moïse en tant qu’un prophète divin. Nous invitons les disciples du Prophète Moïse (salutations sur lui) et les Gens du Livre à l'unité. Par conséquent, personne ne peut présenter les musulmans et les Iraniens - qui ont à plusieurs reprises sauvé les juifs - comme des anti-juifs. Ce que nous disons, c'est que les droits des Palestiniens ne peuvent pas être violés avec de telles excuses et que la seule voie qui peut résoudre le problème de la Palestine est la voie de la démocratie. Aujourd'hui, de nombreuses catastrophes graves dans le monde - y compris l’extrémisme chrétiens et juif ainsi que l'islamophobie - sont enracinées dans la violation des droits des Palestiniens et de telles catastrophes ne disparaîtront, à moins que les droits du peuple de Palestine soient rétablis de manière démocratique.

 

Intervieweur : Après le martyre de Général Soleimani, le Guide suprême de la Révolution a déclaré : « Cet homme a renforcé les Palestiniens. » Qu'est-ce que Shahid Soleimani a fait pour que le Guide de la Révolution dise de telle éloges à son propos ? Comment l'Iran soutient-il le camp de la Résistance à l'heure actuelle ?

Dr. Zarif : La République islamique a toujours soutenu la résistance des Palestiniens et des autres pays musulmans - comme le Liban, la Syrie et d'autres pays arabes - dont les terres ont été occupées par le régime sioniste. Shahid Soleimani était en fait un symbole de la coopération et de l'assistance de la nation iranienne aux peuples de la région. Shahid Soleimani était un individu qui a résistait non seulement face au régime sioniste mais aussi face à l'extrémisme et au terrorisme. Il se tenait aux côtés du peuple résistant d'Irak, de Syrie, du Liban et de Palestine. On pourrait dire que Shahid Soleimani n'était pas seulement un champion de la résistance, mais aussi un champion de la lutte contre le terrorisme et de la promotion de la paix.

 

Certes, son martyre produira de nombreux résultats naturels, dont certains que nous avons constatés en Irak. Après de longues périodes de querelles dans les rues de l'Irak, dès le martyre de notre Général, tous les habitants de ce pays se sont unis pour prendre part à son cortège funéraire et plus tard, ils ont exigé que les États-Unis soient expulsés de l'Irak. L'action de Trump était à la fois stupide et lâche car il ne pouvait pas affronter Shahid Soleimani sur le champ de la bataille et a été forcé de martyriser, en pleine nuit, notre cher martyr et ses compagnons - en particulier, Shahid Abou-Mahdi al-Mouhandis - avec un drone. Comme les Américains le reconnaissent eux-mêmes, les actes terroristes sont un signe de lâcheté, pas de courage.

Avec cette action lâche et stupide, Trump a mis fin à la présence américaine dans la région. Dans d'autres pays comme l'Inde également, le peuple a organisé des manifestations contre les États-Unis dans des centaines de villes. Cela indique qu'avec cette action, les États-Unis se sont donné un coup décisif et ont renforcé le camp de la Résistance et le camp d'anti-domination et d'anti-arrogance dans la région et dans le monde entier.

 

Intervieweur : Comme dernière question, si vous avez une anecdote de votre relation avec Hadj Qassem [Soleimani], voudriez-vous nous en parler.

J'ai presque toujours eu l'occasion de rencontrer ce grand martyr. Chaque fois que nous étions en Iran, nous tenions une réunion une fois par semaine. Shahid Soleimani était un homme raisonnable, intelligent et clairvoyant. Il n'a jamais voulu chanter de purs slogans. On pourrait facilement lui parler. Nous avons souvent eu des points de vue différents au début de nos réunions, mais nous avons toujours fini par parvenir à un accord et nous avons toujours divisé les tâches hebdomadaires entre nous et nous honorions nos paroles tout le temps.

Nous tous - en particulier le Guide suprême - étions toujours inquiets pour Shahid Soleimani. Chaque fois que je voulais lui dire au revoir, je lui chuchotais « Dieu est sûrement le meilleur Gardien » dans ses oreilles. La dernière fois que j'ai vu Shahid Soleimani, c'était dans l’après-midi du dimanche de la même semaine où il a été martyrisé.