Ce qui suit est le texte intégral d'un discours prononcé le 9 Novembre 2006, par l'Ayatollah Khamenei, Guide suprême de la Révolution islamique, lors d'une réunion avec les universitaires de la province de Semnān.

Au nom d'Allah, le très Miséricordieux, le tout Miséricordieux

Ce que je vois dans ce rassemblement de gens talentueux, fervents et enthousiastes est pour moi très significatif. Il en est de même dans la plupart des rassemblements d'étudiants auxquels j'ai l'honneur d'assister. Vous faites partie de la grande population étudiante de notre pays. Un certain nombre d'étudiants de cette province assistent à cette réunion et je leur demande de transmettre mes salutations aux chers étudiants et professeurs qui ne sont pas présents. Dans ce rassemblement, je ressens un grand dynamisme, une grande vitalité, un grand enthousiasme, un grand espoir et une forte préparation pour parcourir les chemins difficiles et atteindre le sommet.

Certaines personnes sont extrêmement énergiques et actives, et peuvent atteindre le sommet. Pour atteindre le sommet, il faut passer par une étape d'aspiration. Quand vous regardez une montagne de votre fenêtre, vous voyez que certaines personnes en ont atteint le sommet. Il y a des gens près du sommet et vous souhaitez être en mesure d'aller là où ces gens sont arrivés. C'est la première étape. L'étape suivante consiste à sortir du lit, à mettre des vêtements et des chaussures appropriés et de se diriger vers la montagne. Certains à la vue des pentes et des difficultés, se découragent et s'impatientent. Ils pensaient atteindre le sommet sans trop de peine, comme un oiseau. Ils ne sont pas prêts à supporter les difficultés pour atteindre le sommet. Certains se découragent rapidement, d'autres commencent l'escalade et franchissent certaines étapes mais se fatiguent après un certain temps. Certains ne renoncent pas à cause de l'épuisement mais s'impatientent et estiment après une demi-heure heure, qu'ils devraient avoir atteint le sommet. Ce sont les problèmes qui empêchent les gens d'atteindre le sommet. Une personne qui monte avec patience, dynamisme, force et espoir, ne craint pas ces longues heures de marche ni les nombreux cols, ni l'abandon de certains amis. Une telle personne doit être sûre qu'elle atteindra le sommet.

Certains se réfèrent aux grandes figures spirituelles et leur demandent de leur enseigner une formule qui fera d'eux des gens pieux et spirituels. Ils pensent qu'il s'agit d'une pilule capable de les transformer du tout au tout. Non, ce n'est pas le cas. Pour atteindre un niveau de spiritualité, il faut se familiariser avec les mondes cachés, si l'on veut entendre la voix des anges de Dieu, être imprégné de la beauté divine et du monothéisme, il faut travailler et progresser. Le sommet est devant nous et il y aura toujours des gens qui se décourageront au milieu du trajet, qui manqueront de patience, qui décideront de faire marche arrière, qui tenteront de décourager les autres et nieront même l'existence du sommet. Ces problèmes existent sur le chemin de la spiritualité ainsi que sur le chemin de la réalisation de profits matériels.

Lors d'une rencontre avec nos étudiants, j'ai dit que vous deviez faire des plans pour les cinquante prochaines années. C'est ce que j'attends de vous dans les domaines scientifiques. Cela doit être notre objectif. Nous devons essayer de faire de notre pays en 50 ans, l'une des plus hautes autorités scientifiques dans le monde de sorte que si quelqu'un décide de connaitre les dernières découvertes scientifiques, il soit obligé d'apprendre notre langue comme nous apprenons actuellement la langue internationale et comme l'a souligné à juste titre, une des intervenantes à cette réunion. Les Anglais ont réussi à faire de leur langue la langue de la science et la langue internationale. Par conséquent, si vous voulez apprendre ou faire une recherche, vous êtes obligés d'apprendre leur langue. Dans les cinquante prochaines années, vous devez développer la nécessité d'apprendre le persan. C'est un souhait et un sommet que nous souhaitons atteindre comme le sommet de Damavand ou de Tochal qui nous invitent à les conquérir, rien qu'en les regardant de loin. Mais qui sera capable d'atteindre ce sommet ? Vous devez vous munir de chaussures et de vêtements appropriées. Plus important encore, vous devez faire un effort et commencer l'escalade.

Je vois cette capacité dans notre jeune génération. Je n'exagère pas. Ce que je dis n'est pas un compliment. Personne n'attend de nous de telles choses. Ce que je dis est la vérité. La jeunesse iranienne est très talentueuse et nous aurons fait une faute si nous, les responsables, ne parvenons pas à identifier les talents de notre jeunesse. Si nos jeunes ne parviennent pas à identifier leurs capacités, ce sera de leur faute et cette erreur aura de graves conséquences et nous empêchera d'avancer et d'atteindre nos objectifs. Mais si nous ouvrons les yeux et trouvons notre trajet, si nous faisons des efforts et ne perdons pas de vue nos objectifs, nous allons certainement atteindre le sommet.

Ceux qui sont à la pointe du savoir et de la science n'étaient pas au sommet dès le début. Il y a cent ans, les Etats-Unis qui sont actuellement en tête au niveau scientifique, dépendaient de l'Angleterre, de la France et de l'Italie pour la production des armes dont ils avaient besoin. Il suffit de se référer aux livres d'Histoire pour le savoir. Pendant la guerre de Sécession entre les Etats du sud et du nord de l'Amérique, le Sud voulait la sécession mais le Nord a décidé de se battre et de ne pas permettre au Sud de faire sécession. Cela a conduit à une guerre qui a duré quatre ans. La guerre a éclaté en 1861, il y a presque 150 ans. Les deux parties considéraient comme un succès le fait d'avoir pu acheter un modèle particulier de canon à l'Angleterre et de les avoir amenés en Amérique par l'océan Atlantique. Ils n'avaient pas de nombreuses installations à l'époque mais aujourd'hui, ils sont à la pointe de la science parce qu'ils ont fait des efforts. Le succès des efforts n'est lié ni à la religion ni à la piété ni à la mécréance ni à l'islam. C'est ce que le Saint Coran nous dit dans le verset que j'ai cité à plusieurs reprises :

«كلاًّ نمدّ هؤلاء و هؤلاء»
«Nous accordons abondamment à tous, ceux-ci comme ceux- là, des dons de ton Seigneur. Et les dons de ton Seigneur ne sont refusés [à personne]."
[Coran 17: 20]

 Dieu dit qu'Il aide tout le monde. C'est une loi divine. Allah le Tout-Puissant aide celui qui fait des efforts pour atteindre un objectif et son but. Le problème d'une personne qui manque de spiritualité est ailleurs. Son problème est que ses efforts sont unidimensionnels et concentrés sur un seul domaine. Une telle personne en subira les conséquences. Aujourd'hui, la société américaine est aux prises avec de nombreux problèmes et sa situation ne cessera d'empirer de jour en jour. Ils s'enfoncent de plus en plus. Les événements historiques ne se produisent pas en un, cinq ou dix ans. Il faut des centaines d'années pour que de tels événements se produisent. Ils (les Etats-Unis) approchent de leur fin et souffrent de graves problèmes, mais ce n'est pas le but de cette réunion. La conclusion est que nous devons faire des efforts et travailler dur, et je vois que vous en êtes capables.

Les points qui ont été mentionnés par les chers amis, l'honorable doyen et certains professeurs et étudiants qui se sont exprimés lors de cette réunion, sont des exigences scientifiques et professionnelles valides. Les demandes qu'ils ont soulignées sont les mêmes que celles que j'avais à l'esprit. Lors de mes rencontres avec les représentants du gouvernement, je leur ai fait part des mêmes exigences. Le fait que vous ayez les mêmes exigences prouve l'importance de la question et heureusement, nos ministres sont également présents à cette réunion. L'importance des sciences fondamentales et des questions relatives à la science et à la recherche, est une des choses que j'ai soulignées à plusieurs reprises. Tout pays qui a réalisé quelque chose l'a fait grâce aux sciences fondamentales.

La question de l'organisation des recherches était un des sujets essentiels que je voulais aborder au cours du mois de Ramadan lors de ma rencontre avec les étudiants ou peut-être avec les professeurs d'université, mais dont je n'ai pas pu parler faute de temps. Je voudrais donc en discuter à cette réunion. Il est nécessaire d'organiser la recherche. Nous disons toujours que notre budget de recherche devrait passer de 0,47% à 3% et discutons constamment de l'aspect quantitatif qui est nécessaire mais ne doit pas nous faire oublier l'aspect qualitatif. Il est nécessaire d'éviter les efforts parallèles et inutiles dans la recherche. L'important est de donner un poids à la recherche théorique, appliquée et expérimentale. Un de nos problèmes est que nous ne prêtons pas assez d'attention à ces trois types de recherche. Il est nécessaire de créer un centre de gestion de la recherche et par la grâce d'Allah, nous allons le faire grâce aux efforts de nos professeurs et des étudiants, avec l'appui du pouvoir exécutif qui est très laborieux et très actif.

En ce qui concerne les problèmes des étudiants, des professeurs et du mouvement pour la justice, je confirme tous les points qui ont été mentionnés à cette réunion et je vais prendre toutes les mesures qui entrent dans le cadre de mes responsabilités. Je vous donnerai les recommandations nécessaires et par la grâce d'Allah, les chers amis poursuivront l'application de ces points et de ces recommandations. Le point que je voudrais vous faire remarquer est tiré d'un célèbre verset coranique qui dit :

«انّ اللَّه لايغيّر ما بقوم حتّى يغيّروا ما بأنفسهم»
«Certes, Allah ne modifie point l'état d'un peuple tant qu'il ne se réforme pas lui-même »
[Coran 13: 11]

Vous êtes ceux qui peuvent donner lieu à des changements. La clé de grandes évolutions sociales est entre vos mains. C'est le sens de ce verset. Ailleurs dans le Saint Coran, Allah le Très-haut dit:

«ذلك بأنّ اللَّه لم يك مغيّرا نعمة أنعمها على قوم حتّى يغيّروا ما بأنفسهم»
«C'est parce que Dieu ne changera jamais une faveur qu'Il a faite à un peuple tant que ce dernier ne change pas"
[Coran 8: 53]

Ce verset, qui est plus précis que le précédent, parle d'un état de régression. Allah le Très-Haut n'impose pas de régression à un pays à moins que ses habitants ne méritent eux-mêmes cette régression. Ce sont les nations elles-mêmes, qui sont la cause des changements qui conduisent à la régression. Il existe de nombreux autres versets qui ont des significations similaires et se réfèrent au même point. Quelle est l'idée essentielle de ces versets? L'idée essentielle est que les êtres humains sont directement responsables des changements qui ont lieu dans leurs sociétés. Ce sont eux qui sont à l'origine de ces changements. C'est la volonté humaine qui joue un rôle déterminant à cet égard.

Qu'entendons-nous par « volonté humaine » ? De la volonté de qui s'agit-il et quelle est son influence ? Bien sûr, cela fait partie des questions qui nécessitent une discussion détaillée mais je dirai que la volonté de chaque être humain joue un rôle non seulement dans les questions individuelles où elle a une influence totale, mais aussi dans les questions sociales. Si nous laissons nos ambitions et nos passions prendre le contrôle de nos actes, si nos actions ne sont pas fondées sur la rationalité et des calculs précis, cela aura des effets négatifs dans la société. Je voudrais vous donner un exemple. Si vous voulez acheter un vêtement ou un ustensile quelconque, vous trouvez sur le marché des marques nationales et étrangères. En fin de compte vous décidez d'acheter un produit étranger à cause de la publicité, par snobisme, parce qu'il existe encore une vision négative des produits nationaux ou parce que le produit étranger pourrait être de meilleure qualité, après tout, la qualité est un facteur important mais ne joue pas un rôle décisif dans votre décision. Quelle est la conséquence de votre décision ? Vous enlevez une occasion de travail à un ouvrier iranien et la donnez à un travailleur étranger. Le chômage n'est-il pas le principal problème de notre société aujourd'hui ? Que se passe-t-il si chacun d'entre nous prend la même décision? Quelle en sera la conséquence ? La conséquence est que nos usines font faillite, que nos ouvriers sont au chômage et que nos investisseurs sont déçus. Le chômage lui-même conduit à la drogue, à la corruption et aux conflits familiaux qui à leur tour, conduisent à de nombreux problèmes politiques et sociaux. Tout commence à partir d'une petite affaire et de la décision d'une personne comme vous et moi, comme quoi les décisions des individus peuvent influencer les grandes évolutions sociales. De nombreux exemples similaires peuvent être cités. Quelqu'un pourrait par hasard emprunter une cigarette à un ami et cette décision occasionnelle aura des conséquences désastreuses, comme l'habitude du tabac, des drogues et des plaisirs éphémères. Ces simples attitudes initiales engendrent et enchaînent de nombreuses évolutions sociales qui à long terme, abroutissent à la régression. Le cas inverse est également correct.

Le matin, je fais parfois une randonnée dans les montagnes du nord de Téhéran. Je pars pour la montagne quand il fait encore sombre. Après la prière de l'aube, les rues ne sont pas bondées mais nous nous arrêtons toujours au feu rouge alors qu'il n'y a pas de voitures dans les rues et quand le feu devient vert nous traversons le carrefour. Parfois, notre cortège s'arrête au carrefour et nous voyons qu'une voiture se rapproche de l'autre côté et que le conducteur semble avoir décidé de brûler le feu rouge. Il roule lentement sur les clous, mais quand il voit que quelques voitures se sont arrêtées derrière le feu rouge, il s'arrête lentement et parfois recule même un peu. Cela signifie que la discipline d'un individu joue un rôle dans le développement de la discipline sociale. Nos actions ont une influence dans la société et permettent la promotion de certaines normes culturelles et dans de nombreux autres domaines. Ce qui est important est que les décisions personnelles jouent un rôle clé et déterminant.

Quel est le sens du changement et pourquoi est-il nécessaire? Le changement est-il inévitable ? Oui, il est inévitable. Le changement dans les communautés humaines est une loi incontournable et divine. Personne ne peut arrêter le changement dans les communautés humaines car il est impossible de le faire. Les changements se produisent nécessairement et c'est juste une question de temps. C'est le secret de la permanence et de la transcendance de l'humanité. Fondamentalement, Dieu a créé les êtres humains de telle manière qu'ils ne peuvent pas rester stagnants. C'est probablement un des facteurs qui distinguent les êtres humains des autres créatures. Bien entendu, même les objets subissent des changements et des transformations, je ne veux pas discuter de ce point car je ne suis pas un expert dans ce domaine et je ne peux donc pas présenter un jugement valable. D'autre part, ce n'est pas des objets dont nous parlons. Le fait est que le changement est inévitable dans la mesure où les êtres humains sont concernés. C'est une erreur de s'opposer au changement ou de le rejeter. Il faut accueillir les changements de manière appropriée, spécialement le genre de changement que je vais vous décrire.

Qu'est-ce qui s'oppose au changement ? La stagnation. La stagnation est à l'opposé du changement. Certains interprètent mal la question et donnent de mauvaises interprétations. Certains confondent stagnation et stabilité sociale. La stagnation est mauvaise mais la stabilité sociale est bonne. Certains confondent stagnation et la stabilité sociale et certains confondent changement, anarchisme et chaos. Ces erreurs ont conduit certains partisans de la stabilité sociale à s'opposer à toutes formes de changements pensant que le changement perturbait la stabilité sociale. D'autre part, il y a des gens qui pensent que tout changement implique la destruction et la remise en cause de tous les principes reconnus. Pour provoquer des changements, ils sapent la stabilité sociale et causent certains dangers. Les deux groupes commettent des erreurs. Le changement est une chose et l'anarchisme en est une autre. Le changement est une chose et le chaos en est une autre, tout comme la stabilité sociale est une chose et la stagnation sociale en est une autre. Ces notions ne doivent pas être confondues les unes avec les autres. La situation idéale est d'avoir une société stable qui ne souffre pas de stagnation et accueille rapidement les changements dont elle a besoin.

Comment pouvons-nous atteindre cet objectif ? En sauvegardant nos racines et nos principes, en évitant la déconstruction de notre identité nationale et en la respectant. L'identité collective d'une nation est une des choses qui doivent rester intactes. En dehors de notre identité nationale, nous devons également sauvegarder notre dynamisme, notre enthousiasme, notre liberté, notre esprit compétitif, et tenir ces choses en haute estime. La survie de ce dynamisme et de cette vitalité exige que nous soyons à la fois, capables de critiquer et d'être critiqués, car les deux sont importants. Certaines personnes sont bonnes dans la critique des autres et font d'ailleurs des critiques valables. Si vous êtes curieux et attentifs, vous pouvez toujours trouver des failles partout. Il n'y a rien de mauvais dans cette attitude tant que l'objectif est d'éliminer les défauts mais certaines personnes qui sont bonnes dans la critique des autres, ne sont pas accueillantes aux critiques et s'offensent même quand quelqu'un leur reproche d'être toujours en train de critiquer et de ne voir que les défauts au lieu des points positifs. Bien entendu, la norme est la supériorité proportionnelle des points positifs sur les points négatifs. Nous avons des faiblesses, des insuffisances et des défauts mais aussi des points forts et positifs. Ce qui est important est la proportion de nos forces et de nos faiblesses, et le respect de la norme. Si nos défauts sont plus nombreux que nos points forts, cela est mauvais par contre si nos points forts sont plus nombreux que nos défauts, c'est une bonne chose. Par conséquent, c'est bien de critiquer mais en même temps, il faut être ouvert aux critiques. C'est ce qu'exigent un changement positif et des conditions favorables dans la société. Ces exigences doivent être accompagnées d'espoir, de travail acharné et d'une bonne planification, et également de cadres et de modèles appropriés pour le changement.

Qu'allons-nous faire maintenant ? Quelles seront les conséquences des changements que nous estimons nécessaires ? Quels sont les choses à changer ? Ces questions sont importantes. Sur ce chemin, le travail et l'effort sont les premières exigences. Par conséquent, il est possible d'introduire des changements tout en préservant la stabilité sociale. Nous avons seulement besoin de préserver les racines, les principales structures et notre identité nationale. Quand je dis «identité nationale» ce n'est pas par opposition à la religion. Au contraire, l'identité de chaque nation se compose d'un ensemble de normes culturelles, de croyances, d'idéaux et de comportements. La piété et la foi religieuse sont des choses qui définissent la culture et l'identité d'une nation pieuse qui suit les Elus de Dieu et les descendants du Saint-Prophète (SAWA). Par conséquent, l'identité nationale inclut aussi les caractéristiques religieuses que nous devons préserver. Il est nécessaire de faire des efforts pour réformer les secteurs, les actions et les méthodes qui posent problème.

Par contre, si la destruction, le nihilisme, le chaos social et politique, et l'abandon de l'identité nationale prévalent dans notre société, ce serait un mouvement qui irait à l'encontre de ce que nous avons réalisé et de ce que nous considérons comme utile et nécessaire. Un tel mouvement est erroné. Quand j'étais jeune, il y avait certaines personnes qui voulaient démolir tous les bâtiments anciens et les remplacer par des bâtiments modernes. A cette époque, les modèles architecturaux occidentaux ont commencé à envahir notre pays. Les bâtiments avec de grandes fenêtres que vous voyez aujourd'hui, sont apparus à cette époque. J'ai été surpris de voir démolir des anciens bâtiments très solides dans ma ville natale, à Machhad. Ils détruisaient les bâtiments qui étaient vieux mais solides, et construisaient à la place, des maisons en utilisant des poutres de fer, du ciment, des portes en fer et des fenêtres très larges. Tandis que nos architectes, experts et ingénieurs dans ce domaine, estiment que les anciennes architectures étaient plus appropriées aux conditions de notre pays que ces grandes fenêtres qui laissent entrer plus de soleil et sont bons pour l'Europe où l'ensoleillement est très faible alors que ce n'est pas le cas dans notre pays, en particulier dans certaines régions. Pourquoi construire de grandes fenêtres ? Les petites fenêtres et portes en bois, nous convenaient très bien. De telles actions étaient mauvaises et irrationnelles.

Dans le cas des évolutions essentielles et fondamentales de la société, il se peut que nous aussi, nous agissions dans le mauvais sens, que nous oubliions notre identité nationale et notre indépendance au lieu d'en préserver les fondements et d'insister sur ce qui nous manque et nos besoins. Malheureusement, cette situation longue et tragique, fut celle de notre pays pendant longtemps ainsi que dans de nombreux autres pays islamiques. J'aborderai brièvement cette question plus tard.

Plus dangereux encore est que le contrôle des développements internationaux tombe aux mains de gens qui poursuivent des objectifs personnels - la richesse ou le pouvoir - dans ces développements et ces changements. Ces gens-là n'ont aucun respect pour l'identité nationale. Malheureusement, cela a été le cas dans le monde, au cours des 100 ou 150 dernières années. Les pays asiatiques, africains et latino-américains sont tombés dans le piège des machinations des gangs internationaux de pouvoir, des sionistes et des capitalistes internationaux dont l'objectif était de prendre le pouvoir politique pour s'infiltrer dans les gouvernements et les pays européens et non européens, accumuler les richesses et installer leurs grandes entreprises, leurs cartels et leurs trusts. C'était le but de ces gens-là. Chaque fois qu'il était nécessaire de répandre la corruption morale, ils l'ont fait. Chaque fois qu'il était nécessaire de promouvoir la consommation, ils l'ont fait. Chaque fois qu'il était nécessaire de pousser les gens à ignorer leur identité nationale et leurs bases culturelles, ils l'ont fait. C'étaient leurs principaux objectifs. Ils ont toujours eu à leur disposition des équipements culturels et médiatiques, ainsi que de nombreux journaux et différents outils de propagande. Ces choses se sont peu à peu propagées dans le monde. Hier, j'ai lu un article au sujet de la mise en place d'une "Otan culturelle". J'avais vu cet article il y a trois ou quatre mois. Les Américains ont créé l'Otan qui est une puissante organisation militaire en Europe, et ont annoncé qu'ils en avaient besoin pour lutter contre l'ex-Union soviétique alors qu'ils l'ont utilisée pour supprimer toute opposition au Moyen-Orient, en Asie et dans d'autres régions du monde. Maintenant, ils ont créé une "Otan culturelle" qui est une chose très dangereuse. Bien sûr, cela n'est pas nouveau et date de plusieurs années. Un groupe de réseaux médiatiques y compris les sites Internet, les chaînes satellitaires et les stations de télévision et de radio avancent dans une direction particulière afin de prendre le contrôle des développements qui se produisent dans les différentes sociétés. Leur travail est devenu très simple et tout à fait transparent.

Lors des évolutions politiques en Géorgie qui ont conduit à un transfert du pouvoir, un capitaliste juif et sioniste américain célèbre dont je ne veux pas mentionner le nom, a annoncé qu'il avait dépensé dix millions de dollars en Géorgie pour occasionner un bouleversement politique. C'est aussi simple que cela, ils dépensent dix millions de dollars pour faire sauter un gouvernement et le remplacer par un autre. Ils influencent les gens en établissant certaines communautés. Ils ont agi de la même façon en Ukraine et dans d'autres endroits. Parfois même, ils jouent un rôle plus déterminant sous d'autres formes. Je crois que j'en ai parlé une fois lors d'une réunion avec les étudiants. Mahathir Mohamad, l'ancien Premier ministre de Malaisie, qui était un très homme travailleur, méticuleux, sérieux et engagé, a fait un voyage à Téhéran pendant lequel il s'est entretenu avec moi. A cette époque, différents développements avaient eu lieu en Asie orientale. De graves évolutions économiques avaient eu lieu en Malaisie, en Indonésie et en Thaïlande. Le capitaliste sioniste que j'ai mentionné et d'autres capitalistes avaient réussi à faire tomber plusieurs pays en faillite par le biais de jeux bancaires et monétaires. Lors de la réunion, Mahathir Mohamad m'a dit : "Je peux dire en résumé, que nous avons tout perdu en une seule journée!" C'est ce qui arrive quand un pays devient économiquement dépendant et applique les prescriptions de la Banque Mondiale et celles du Fonds Monétaire International.

La Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International sont en fait deux pièces de ce grand puzzle. Si le contrôle de l'évolution mondiale tombe aux mains de gangs internationaux, la situation devient très dangereuse. C'est ce qui s'est passé. Les gens qui ont le contrôle de ces développements sont des sionistes et des capitalistes dont la plupart vivent aux Etats-Unis et en Europe. Ce sont les quelques points dont je voulais parler en ce qui concerne le changement. Par conséquent, il c'est une erreur de fuir le changement et d'en avoir peur. Le changement ne doit pas être confondu avec le chaos et l'anarchie. Le changement est bon et nécessaire.

Le point important que je veux aborder aujourd'hui, est que les attitudes réactionnaires et le rejet des innovations ne nous mèneront nulle part, de même que l'abandon des principes, la destruction et l'anarchie économique, idéologique et culturelle. Les deux sont mauvais. En ce qui concerne la liberté de pensée, j'ai soulevé cette question, il y a deux ou trois ans, et nos étudiants ont accueilli mes commentaires au sujet de l'organisation des débats libres, mais mes suggestions n'ont pas vraiment été mises en pratique ni dans nos centres islamiques ni dans nos universités. J'ai dit que les étudiants devaient organiser des débats libres. Bien entendu, je me souviens que dans les rapports des universités de Semnān, j'ai lu que les associations actives d'étudiants à Semnān, avaient organisé plusieurs débats entre elles. Ces activités sont très constructives et très bonnes, si le rapport que j'ai reçu est exact.

Il est nécessaire de laisser la voie ouverte à la liberté de pensée, à l'innovation et au changement, mais il est également nécessaire de les gérer de sorte qu'ils n'aboutissent pas à une démolition et ne portent pas atteinte aux fondements de notre identité nationale. Cela exige une gestion appropriée. Qui doit le faire? Les regards pourraient immédiatement se tourner vers le gouvernement, le ministère de la Science, de la recherche et de la technologie ou d'autres organisations, mais en fait ce sont nos personnalités éminentes et nos élites qui doivent gérer ces affaires. Ce travail de gestion vous appartient. Il appartient à nos professeurs actifs, à nos étudiants et aux associations d'étudiants. Soyez prudents. Cherchez des idées nouvelles mais examinez de façon minutieuse l'orientation des idées qui sont avancées pour voir si elles sont constructives ou destructives. Ces deux ensembles d'idées sont complètement différents l'un de l'autre. C'est une responsabilité qui repose sur vos épaules. Bien entendu, il ne fait aucun doute que des gens comme moi ont également des responsabilités, mais la responsabilité principale repose sur vos épaules. Ne pensez pas que les responsables gouvernementaux comme moi, pourraient prendre en charge la responsabilité d'un mouvement pour la liberté de pensée, le changement et la prise de mesures dans différents domaines. C'est une responsabilité qui doit être assumée par nos étudiants, nos professeurs et nos chercheurs. Mon rôle consiste à vous dire ce qui est bon. Par exemple, j'ai proposé l'idée d'un « mouvement logiciel » pour la production de connaissances. Dix ans ont passé et aujourd'hui, ce mouvement a révolutionné le pays. Qui a commencé le mouvement ? Je n'ai dit qu'un seul mot à ce sujet. C'est vous qui avez fait le reste. Ce sont nos chercheurs, nos étudiants et nos professeurs qui ont fait le reste. C'est de cette manière qu'un changement aura lieu.

La gestion du changement est le devoir des élites intellectuelles et culturelles de notre société, de nos universités et de nos centres islamiques. Il ne faut ni éviter le changement ni nous résigner à tout changement. Quel est le but du changement ? Le progrès. Qu'est-ce que le progrès? C'est cela que nous devons définir.

La première question que nous devons nous poser est la suivante : Qu'est-ce que le progrès? Si nous ne nous posons pas cette question, il est évident que nous ne sommes pas vraiment à la recherche du progrès. Par conséquent, nous devons d'abord nous poser cette question et chercher la réponse adéquate.

Différentes définitions ont été proposées dans le monde pour le «progrès». Il existe différentes réponses, des fausses réponses, des réponses étranges et des recommandations contradictoires et perfides également, dans certains cas. C'est ce qui nous est arrivé quand nous avons commencé à moderniser notre pays. Lorsque les signes des progrès de l'Europe sont devenus clairs pour les Iraniens, ils ont commencé à réfléchir sur ce qui se passait en Europe. Avant cela, ils n'avaient aucune idée de ce qui se passait dans le monde. Les rois Qadjar étaient tellement occupés par leur harem, leurs cuisines, leurs problèmes personnels et tant de questions insignifiantes, qu'ils n'avaient aucune idée de ce qui se passait dans le monde. Jusqu'à l'époque de Fathali Shah et même après cela, ils n'avaient aucune idée de ce qu'avait été la Renaissance, comment et pourquoi elle s'était produite et quelles avaient été ses conséquences. Plus tard, une guerre a éclaté entre l'Iran et la Russie et étant donné que les Russes avaient acheté des armes modernes, la dynastie des Qadjars a essuyé une forte défaite. C'est alors seulement qu'ils ont décidé d'envoyer quelques personnes en Europe et que les ambassadeurs des pays européens ont profité d'une plus grande liberté en Iran. Certains messagers et agents spéciaux ont alors été envoyés en Iran pour préparer le terrain aux ingérences politiques. Ils ont apporté avec eux, leurs propres méthodes. Qui a été confronté à la première vague de cette soi-disant "modernité" ? Les princes, les employés de la cour des Qadjars et des personnalités politiques influentes de l'époque. La majorité des gens n'en savaient rien, nos religieux n'étaient pas au courant et les personnes étaient également dans l'ignorance la plus totale. Sauf un nombre très limité de personnes, les gens étaient normalement confus et stupéfaits quand ils étaient confrontés à la culture et aux progrès faits par et pour l'Europe. Ils ont perdu leur confiance en soi et ont abandonné l'idée de faire des progrès après avoir vu les progrès de l'Europe. Ils n'ont pas réagi sagement. Quel a été le résultat ? Le résultat est que nos intellectuels de haut rang sont arrivés à la conclusion que les Iraniens devaient être occidentalisés de la tête aux pieds s'ils voulaient progresser. C'est-à-dire une imitation aveugle. C'est de cette façon qu'ils ont agi et cette tendance s'est poursuivie jusqu'à l'époque du régime Pahlavi.

Une fois que le régime Pahlavi est arrivé au pouvoir, il a pris des initiatives pour l'occidentalisation de l'Iran et accélérer ce processus. Les Occidentaux n'étaient pas satisfaits du niveau d'occidentalisation réalisé sous la dynastie Qadjar. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ils ont mis les Pahlavis au pouvoir et ont décidé de laisser un certain nombre d'intellectuels iraniens en qui ils avaient confiance, aider les responsables Pahlavi à faire le nécessaire. L'interdiction du hidjab, le changement des costumes locaux, la suppression de certains titres iraniens comme Mirza, Sayed, Khan et Agha du nom des Iraniens, le grand nombre de concessions aux étrangers dans les domaines pétroliers et l'appel croissant aux conseillers étrangers, faisaient partie de ce plan. Plus tard, après que les Anglais aient éjecté Reza Khan du pouvoir, les Américains ont pris officiellement la charge de toutes les affaires dans le pays à partir de l'année 1332 [1953]. C'est ce qui nous est arrivé à l'époque des Taghouts et la gestion dangereuse que je viens de présenter se dirigeait vers la destruction de nos racines. Si au moins ils avaient reçu quelque chose en retour. Ils n'ont rien gagné pour les concessions qu'ils ont faites. Par exemple, les Iraniens n'ont même pas réussi à créer un centre de recherche dans le pays ni à inventer une ou deux choses au cours de cette longue période où les Anglais et les Occidentaux étaient au pouvoir, c'est-à-dire plus de 60 ou 70 ans. Ils n'ont pas réussi à former un nombre suffisant de scientifiques pour donner lieu à deux ou trois inventions scientifiques. Ils n'ont même pas bénéficié de la présence des étrangers. Qu'est-ce que les Occidentaux voulaient ? Ils voulaient des consommateurs. La consommation de produits étrangers conduit inévitablement à la consommation de produits culturels et à la capitulation politique. C'est ce qu'ils voulaient et nos responsables et intellectuels n'ont même pas résisté. Toutes les tensions et tous les conflits et défis qui sont apparus pendant la dynastie des Qadjars, depuis l'interdiction du tabac jusqu'à l'époque de Reza Khan et plus tard, ont eu lieu entre le camp des croyants mené par nos érudits religieux, et le camp des dirigeants et des dictateurs. Dans le cas de la concession de "La régie du tabac", Mirza Shirazi a protesté contre cette offre gratuite aux étrangers d'une grande ressource de notre revenu national. Ce fut aussi le cas lors de la concession « Reuter » et « l'Accord Anglo-Persan de 1919 » connu sous le nom de « l'accord Vosough-od-doleh », qui remettait le pays aux Anglais. C'est Hassan Modarres, ce grand religieux, qui a protesté contre cet accord.

Nous avons vu la même chose dans la nationalisation de l'industrie pétrolière, lorsque le défunt Abol-Ghasem Kashani (paix soit sur lui) a dû intervenir. Les tensions qui existaient entre les religieux soutenues par le peuple, et certains intellectuels et dirigeants, venaient des décisions des étrangers qui mettaient en danger nos intérêts nationaux. Par conséquent, dans certains cas, les définitions étrangères et occidentales du progrès sont de véritables trahisons.

Pour trouver la bonne définition du progrès, que devons-nous faire ? Tout d'abord, cela exige des débats théoriques que vous devez organiser. Vous devez discuter pour trouver la signification de ce que sont les progrès nationaux d'un pays. Bien entendu, nous devons éviter des discussions trop théoriques et de perdre notre temps à discuter sans tenir compte des réalités extérieures. Bien entendu, par débats je n'entends pas des discussions théoriques. Non, ce n'est pas ce que j'envisage. J'ai dit une fois que nous étions la cible d'une invasion culturelle, il y a 12 ou 13 ans. Si on m'avait demandé des exemples et des signes de cette invasion culturelle, j'en aurais facilement donnés parce que c'était une chose que je constatais de mes propres yeux. J'ai présenté quelques signes dans mes discours, mais certains ont commencé à nier l'existence de cette invasion culturelle.

Cela m'a rappelé tout de suite Bani Sadr, au début de la guerre que l'Irak nous a imposée. Les populations locales qui étaient soucieuses de la situation du pays se rendaient auprès de lui et lui disaient que les Irakiens avaient violé nos frontières et avaient pénétré dans notre territoire. Nous lui disions: "Monsieur le Président, il parait que les Irakiens ont envahi notre territoire. Avez-vous des informations à ce sujet ?" Il disait qu'ils mentaient et que les membres du Corps des gardiens de la Révolution islamique répandaient ces rumeurs pour se créer des opportunités. Il accusait ceux qui disaient que les Irakiens avaient attaqué le pays. Plus tard il s'est rendu lui-même à Dehloran qui n'était pas occupée à l'époque et s'est tenu face à la caméra pour une interview en direct. Il a dit, "je suis à Dehloran. Il parait que les Irakiens ont occupé cette ville. Mais où sont-ils ?" Deux heures après son départ, les Irakiens ont occupé Dehloran. Nous ne devons donc pas fermer les yeux et ignorer les réalités.

Que les salutations et la miséricorde d'Allah soient sur vous et que Ses bénédictions vous accompagnent !