L'une des expressions les plus fréquemment utilisées pour décrire les crimes commis par le régime sioniste ces derniers jours est la question de son recours à la « punition collective » des civils de Gaza, c'est-à-dire le génocide des Gazaouis. Cette question est sensible, car les punitions collectives sont considérées comme un crime de guerre interdit par les traités concernant les conflits armés internationaux et non internationaux, notamment l'article 33 de la Convention de Genève et l'article 6 du Protocole additionnel II. Le plein soutien des États-Unis, de l’Angleterre, du Canada, de l’Allemagne et de la France à ce crime s’est heurté à une réaction négative de l’opinion publique mondiale.

La question qui s’est posée dans l’esprit des gens du monde entier est la suivante : pourquoi les pays qui sont les leaders mondiaux de la démocratie libérale non seulement tolèrent-ils cet énorme crime, mais le gèrent-ils également ? Quelques questions sont soulevées ici : Tout d’abord, est-il juste de dire que le problème réside dans la dichotomie entre les valeurs libérales et leur pratique ? Ou bien le libéralisme, en tant que point de vue théorique, rend-il possibles ce type de crimes ? Si oui, comment est-ce possible ?

Le défaut le plus important du libéralisme est qu’il s’articule autour de « l’individualisme » et que, par conséquent, « l’éthique » n’y occupe pas une place centrale et primordiale. Lorsque nous parlons d’autres composantes du libéralisme, telles que l’égalité, la rationalité, les droits, la propriété privée et la liberté, elles sont toutes définies par rapport à l’individualisme. Les valeurs humaines, qui devraient être placées au-delà de l’individualisme en tant que critères des relations humaines dans les sociétés humaines, n’ont plus leur place dans le libéralisme. Cela équivaut à l’absence de règle morale dans la société. C’est dans ce type de sociétés que nous constatons l’émergence et l’intériorisation des structures théoriques du racisme et du darwinisme social. En d’autres termes, seules les sociétés fortes ont le droit de survivre et les faibles seront naturellement éliminées.

Des centaines d’années de colonialisme de la part des pays libéraux pourraient sembler être le comportement le plus injustifiable au regard des principes du libéralisme. Mais si l’on y regarde de plus près, nous sommes confrontés à un phénomène appelé impérialisme libéral. Cette vision théorique est une combinaison de la théorie des « étapes du développement historique » et du « libéralisme ».

Selon la théorie des « étapes du développement historique », toutes les sociétés passent naturellement par un processus de développement allant de la chasse à l’élevage, en passant par l’agriculture et le commerce, qui forme simultanément un arc culturel allant de la « sauvagerie » à la « barbarie » et puis à la « civilisation ». Selon cette théorie, tout comme le soleil se déplace d’est en ouest, la civilisation peut toujours être trouvée en Occident sous une forme plus complète. Le langage de la civilisation, de la sauvagerie et de la barbarie est répandu dans les œuvres d’écrivains tels que John Stuart Mill, considéré comme l’un des pères du libéralisme. Par conséquent, cette théorie n’est pas distincte de la tradition libérale et, étant donné que des personnalités des Lumières (Enlightenment) écossaises telles qu’Adam Ferguson et Adam Smith étaient parmi ses principaux représentants, elle est fortement liée au libéralisme.

L’idée selon laquelle la civilisation est le point culminant d’un processus de développement historique a été utilisée pour justifier l’impérialisme. Même si l’un des principes les plus importants du libéralisme repose sur le fait que tous les peuples ont la capacité de rationalité et de souveraineté ; cependant, la théorie des étapes du développement historique considère cette universalité comme exclusive à un certain stade de la civilisation. En d’autres termes, les humains n’ont pas la capacité de vivre dans des conditions libérales (liberté et égalité des droits) s’ils ne sont pas civilisés.

Par exemple, selon John Stuart Mill, les sauvages n’ont pas la capacité de gouverner leurs sociétés en raison de leur amour excessif de la liberté. D’un autre côté, dans les sociétés barbares, l’obéissance des sujets, des esclaves et des paysans a été tellement intériorisée qu’elle a étouffé leur capacité de rationalité. Seules les sociétés commerciales créent les conditions matérielles et culturelles permettant aux individus de réaliser leur potentiel de liberté et d’autonomie.

Selon cette logique, les sociétés civilisées comme l’Angleterre agissent en leur faveur en gouvernant les peuples les moins développés. De ce point de vue, l’impérialisme n’est pas principalement une forme de domination politique et d’exploitation économique, mais plutôt une pratique paternaliste d’un gouvernement qui exporte la « civilisation » (par exemple la modernisation) pour contribuer au progrès des peuples autochtones. Le despotisme (un terme que John Stuart Mill n'hésite pas à utiliser) est un moyen d'amélioration et, en fin de compte, d'« autonomie gouvernementale ». Cette vision théorique a été interprétée comme « le fardeau de l’homme blanc » – ce qui a malheureusement été accepté par certains intellectuels des sociétés colonisées.

De la même manière qu'avec un tel système de pensée nous devrions considérer le colonialisme comme le fruit du libéralisme, il faut dire que le soutien honteux des soi-disant chefs du libéralisme au régime sioniste et au génocide ouvert de la population de Gaza est aussi le fruit du libéralisme. Tout comme il n'y avait aucune limite morale ou humaine pour réprimer les soulèvements anticoloniaux dans le colonialisme, un tel déficit peut être constaté dans la confrontation du régime sioniste avec le soulèvement anticolonial contre le régime d'apartheid sioniste, de manière à ce que ce régime illégitime a eu recours à la punition collective des habitants de Gaza dans l’espoir de mettre la Résistance à genoux.

*** Le Dr Hakimeh Saghaye-Biria est professeur à l'Université de Téhéran, Faculté de la science et théologie islamique. Elle est titulaire d’un doctorat en études américaines de l’Université de Téhéran, d’une maîtrise en communication de masse de la Louisiana State University et d’un baccalauréat ès arts en communication de l’Université de Houston.

 

(Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles de Khamenei.ir.)

Source : https://english.khamenei.ir/news/10287/Fruit-of-liberalism-Supporting-Zionists-crimes