Le refus des États-Unis de répondre aux demandes des révolutionnaires de renvoyer le Chah rappelait le coup d'État que les États-Unis et l'Angleterre avaient lancé contre le gouvernement légal et démocratique de l'Iran en 1953. Cela a créé l'inquiétude et l'incertitude que les États-Unis pourraient, comme autrefois, conspirer à nouveau contre le peuple iranien et faire quelque chose pour envenimer le goût de la victoire, neutralisant ainsi les années de lutte et d'efforts déployés par des milliers d'hommes et de femmes torturés et assassinés.

Les Iraniens se souviennent encore comment en 1953, le gouvernement démocratique en Iran a été renversé par un coup d'État américain et britannique et que Réza Pahlavi est remonté sur le trône. Dans cette épreuve, le Premier ministre britannique Winston Churchill et l’administration américaine d’Eisenhower ont fait valoir que le gouvernement démocratique de Mossadeq en Iran n'était pas fiable. Ils craignaient que cela ne conduise à la domination des communistes en Iran et ont décidé de renverser son gouvernement et de réinstaurer la tyrannie et la dictature en Iran. Après le renversement du gouvernement de Mossadeq, le Chah est retourné à Téhéran et a accédé au pouvoir en étant accompagné du directeur de la CIA de l'époque, Alan Dulles. [1]

Cette image sombre des États-Unis et le scepticisme à l'égard de leurs objectifs en Iran étaient enracinés à la fois dans la mémoire historique à court et à long terme de la nation iranienne. En fait, bien que la Révolution populaire iranienne ait porté ses fruits en février 1979 et que, peu de temps après, la République islamique d'Iran ait été établie par la tenue d'un référendum national, les États-Unis ont utilisé tous leurs agents et organisations dans l'espoir de vaincre la Révolution, avant comme après sa victoire.

Un exemple en était lorsque le général Robert E. Huyser s’est rendu en Iran avant la victoire de la Révolution, après que le Chah eut quitté le pays. Il était en mission secrète pour contrecarrer la Révolution. Son plan pour paralyser la Révolution comprenait des projets visant à provoquer un coup d'État militaire. [2]

En ce qui concerne les actions des États-Unis contre la Révolution iranienne naissante au cours des premiers mois du gouvernement nouvellement établi de la République islamique d'Iran, tout ce que nous avons à faire est de nous référer à l'un des documents secrets de l'ambassade américaine en Iran. Selon les notes contenues dans ces documents, si les Kurdes, les Azéris, les Arabes et d'autres groupes ethniques avaient fait l'effort de se coopérer et de se soutenir mutuellement pour renverser le gouvernement actuel, ils auraient pu réussir en créant des défis difficiles pour la République islamique d'Iran. [3]

C'est dans ces circonstances que les étudiants révolutionnaires, soucieux d’empêcher le changement du cours de la Révolution, sont entrés dans l'ambassade américaine et l’ont capturée dans une logique de dissuasion. Cela a été suivi par des déclarations de soutien de l'imam Khomeiny qui a décrit la capture de l'ambassade américaine comme une « Deuxième Révolution ».

Maintenant, après plusieurs décennies, l'exactitude de ce point de vue est devenue claire. L'action entreprise par la jeunesse et les intellectuels révolutionnaires visait à briser l'organisation et les relations d'une puissance d'intervention bien équipée appelée les États-Unis, qui s'était toujours ingérée dans les affaires intérieures de ce pays et avait maintenant la possibilité de renverser et mettre fin à ce nouveau système.

Quelque 30 ans après la Révolution islamique d'Iran, la vague de l’Eveil Islamique s'est propagée dans la région de l'Asie de l'Ouest et de l'Afrique du Nord, et les voix indignées des peuples de pays comme l'Égypte, la Libye, le Yémen et Bahreïn ont résonné contre leurs dirigeants et les dictateurs tyranniques. . Les populations en colère sont descendues dans la rue et ont organisé des manifestations dans tout le pays, appelant au renversement de ces régimes incompétents, exigeant qu'ils soient remplacés par un système démocratique et juste.

Le soulèvement des peuples d'Asie de l’ouest et d'Afrique du Nord n'a généralement pas abouti à un résultat souhaitable. En fin de compte, soit les manifestations populaires ont été inefficaces, soit ceux qui sont arrivés au pouvoir à la suite des manifestations n'ont pas répondu aux revendications du peuple, continuant toujours l'héritage d'injustice et d'oppression des régimes précédents.

En réponse à la question de savoir pourquoi cet Eveil Islamique n'a pas atteint ses objectifs, il y avait un point commun dans les événements qui se sont déroulés dans tous ces pays, et c’est la connexion continue des États-Unis aux pays susmentionnés. En conséquence, les bases et installations américaines y existantes ont été utilisés pour détourner les objectifs révolutionnaires et diriger les événements vers les intérêts impérialistes.

Tout comme le soulèvement de la Révolution islamique d'Iran en 1979 a surpris les États-Unis, le soulèvement dans certains de ces pays comme la Tunisie et l'Égypte a également pris l'Occident par surprise. [4] L'incapacité à prédire ces soulèvements a poussé la Maison Blanche et le Congrès américain à remettre sérieusement en question et à réprimander les agences d'espionnage américaines.

De plus, tout comme les États-Unis avaient soutenu le régime monarchique en Iran jusqu'à ses derniers instants, ils ont également soutenu des régimes dépendants comme ceux de Tunisie, d'Égypte et de Bahreïn, déployant des efforts pour leur survie. Cependant, la série d'événements dans ces pays et dans d'autres pays s'est déroulée de telle manière qu'ils ont connu un résultat différent de celui de la Révolution islamique de la nation iranienne.

Par exemple, lorsque la résistance des révolutionnaires égyptiens et leurs avancées ont assuré la chute du dictateur égyptien Hosni Moubarak, les États-Unis sont restés connectés à la nouvelle structure du pouvoir en Égypte afin de maintenir leur infiltration afin de pouvoir influencer le cours des événements qui ont suivi. . Par conséquent, ils ont montré leur soutien et coopéré avec le «Conseil suprême des forces armées» [5] égyptien, qui a pris le pouvoir après la démission de Moubarak. Le même conseil a également publié une déclaration dans laquelle il a rassuré les États-Unis et le régime sioniste que l'accord de Camp David de 1979 resterait en place. Il est intéressant de noter que dans un discours prononcé par l'un des membres du Conseil suprême des forces armées égyptiennes à l'Institut américain pour la paix, il a été annoncé que « Nous [l'Égypte] entretenons de solides relations stratégiques avec les États-Unis depuis l'Accord de Camp David en 1979… et nous devons développer ces relations. » [6] Finalement, Mohamed Morsi, le président démocratiquement élu de l'Égypte, a été arrêté, jugé et condamné à mort par les agents de ce même Conseil à cause de l'ingérence des États-Unis.

Les États-Unis ont également pu maintenir leur influence dans d'autres pays et empêcher les soulèvements populaires en utilisant des méthodes similaires ou en proposant de nouvelles initiatives.

Un autre exemple en a été observé lorsque les responsables de la Maison Blanche ont profité de la révolte et de la crise en Libye pour annoncer leur opposition à Mouammar Kadhafi - celui qui rappelait aux États-Unis leurs souvenirs amers en Libye. Ils ont pénétré au cœur de la crise, à côté des masses en colère, et ont déployé tous leurs efforts pour sécuriser et renforcer leurs intérêts et leur influence dans ce pays riche en pétrole. [7] Le résultat de l'ingérence des États-Unis dans les affaires de la Libye a été les frappes aériennes de l'OTAN sur le pays, le meurtre de soldats et de civils et la mise en place de meilleures conditions pour la poursuite des intérêts économiques et politiques de Washington en Libye.

En conséquence, l’Eveil Islamique, connu sous le nom de Printemps Arabe dans les médias de masse, a échoué dans les pays qui, volontairement ou involontairement, n'ont pas pu couper leur lien avec les États-Unis. Par conséquent, non seulement les intérêts des États-Unis à leur égard sont restés intacts à des degrés divers, mais ils ont également été renforcés.

Les deux seuls pays dans lesquels les États-Unis ont perdu leur influence étaient le Yémen et la Syrie. Dans ces deux cas, les ambassades des États-Unis ont été fermées et, au fil du temps, le parti qui était contre les États-Unis et qui recherchait l'indépendance, a réussi.

Dans le cas de la Syrie, les États-Unis ont tenté de renverser le gouvernement de ce pays en incitant à un faux soulèvement, à des troubles et à une guerre civile, ce qui a finalement abouti à l'attaque de la coalition contre la Syrie. Un certain nombre de personnes qui voulaient [maintenir] un pays indépendant et étaient partisans du gouvernement légalement établi là-bas, ont attaqué l'ambassade des États-Unis. Ils ont pu voir que le président américain avait publiquement déclaré son opposition au gouvernement légitime de la Syrie et que Robert Ford, l'ambassadeur américain en Syrie à l'époque, s'était joint aux manifestants. [8] Ce faisant, Ford s'immisçait pratiquement dans les affaires intérieures de la Syrie, encourageant les émeutes à éclater dans le pays. Cette attaque protestataire a démontré la prise de conscience du peuple concernant l’impact des connexions et des liens intermédiaires et complices des États-Unis en Syrie. [9]

Les déclarations du directeur du Center for Middle East Studies de l'Université de l'Oklahoma témoignent de ce point de vue. Au cours des premiers mois des troubles syriens et avant la fermeture de l'ambassade américaine, il a clairement indiqué le rôle important que l'ambassade américaine jouait en Syrie. Il a souligné comment les employés de l'ambassade iraient au cœur de l'endroit où se déroulaient les émeutes, car les employés de l'ambassade étaient les meilleures sources d'informations de renseignement en Syrie.

Peut-être que les États-Unis ont fermé leur ambassade en Syrie dans l'espoir de revenir après le renversement de Bachar el-Assad, cependant, le gouvernement syrien légitime et légal a profité de l'absence d'une organisation d'espionnage et d'ingérence. Avec l'aide de ses alliés et de ceux qui s'opposent à l’Arrogance mondiale, en particulier la République islamique d'Iran, il a avancé jusqu'à éradiquer les intérêts et l'influence organisationnelle des États-Unis en Syrie.

Il est possible de voir un exemple réussi de ce qui s'est passé en Syrie à des kilomètres lointains de l'Asie de l’ouest en Amérique latine. Juan Guaidó, le chef de l'opposition au gouvernement central du Venezuela, a annoncé qu'il était le « président par intérim » du pays en tentant de prendre la présidence lors d'un coup d'État en janvier 2019. Après l'annonce de Guaidó, les États-Unis ont immédiatement déclaré qu’ils reconnaissaient Guaidó comme le prochain président à l'appui de ce coup d'État. Ils voulaient également que d'autres pays du monde déclarent leur soutien aux Vénézuéliens qui avaient comploté ce coup d'État. Le gouvernement de Nicolás Maduro, le président légalement élu du Venezuela, a répondu à la décision de la Maison Blanche en coupant les relations de Caracas avec Washington. Ils n'ont donné à tous les diplomates de l'ambassade américaine que 72 heures pour quitter le pays.

Après que le gouvernement vénézuélien a pris cette mesure décisive, toutes les tentatives des États-Unis pour stabiliser la position de ceux qui avaient comploté le coup d'État ont échoué. Le Venezuela a réussi à surmonter toutes leurs conspirations pour changer le gouvernement vénézuélien en s'appuyant sur l'unité nationale malgré les lourdes sanctions économiques imposées par la Maison Blanche. La résistance nationale du Venezuela a forcé l'administration Biden à reconsidérer l'utilisation de la « politique de pression maximale » inefficace contre Caracas.

Des différends et des conflits fondamentaux et essentiels existent entre les puissances arrogantes - avec les États-Unis d'Amérique en tête de liste - et les révolutions populaires en quête de justice qui cherchent l'indépendance. La présence politique et l'influence des États impérialistes et des puissances arrogantes dans les pays où les peuples ont mené des révolutions fondées sur la justice et l'indépendance ont toujours affaibli et continueront d'affaiblir les révolutions et leurs réalisations. Par conséquent, l'un des moyens les plus importants d'empêcher cet affaiblissement et des déviations via les contre-révolutions est de minimiser ou éradiquer l'influence et l'ingérence politiques des pays dominateurs et colonisateurs. Il convient de noter qu'à l'époque actuelle, créer des déviations dans les mouvements d'indépendance et de justice des nations ne se limite pas aux interactions politiques directes. Les champs de la guerre d’influence, cognitive et culturelle sont devenus le moyen le plus important pour créer des déviations et détruire les acquis des mouvements démocratiques.

Notes : 

[1] Ahmed, Eqbal (1980). "What's Behind the Crises in Iran and Afghanistan", Social Text (3): 44–58.

[2] https://www.theguardian.com/world/iran-blog/2015/feb/11/us-general-huysers-secret-iran-mission-declassified

[3] https://b2n.ir/x06366

[4] https://www.nytimes.com/2011/02/05/world/middleeast/05cia.html

[5] https://www.usip.org/publications/2011/07/beyond-tahrir-trajectory-egypts-transition

[6] Gamal M. Selim. (2013). "The United States and the Arab Spring: The Dynamics of Political Engineering", Arab Studies Quarterly, 35(3), 263

[7] https://www.nytimes.com/2011/07/12/world/middleeast/12syria.html

[8] https://www.businessinsider.com/why-are-regime-loyalists-attacking-the-us-embassy-in-syria-2011-7

[9] https://www.telesurtv.net/news/venezuela-nicolas-maduro-rompe-relaciones-diplomaticas-eeuu-20190123-0027.html